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Un moyen d’action méconnu de l’Inspection du travail : le référé judiciaire

Publié le 5 octobre 2022 | Dernière mise à jour le 2 décembre 2022

Dans un certain nombre de cas, l’inspecteur du travail a la faculté légale d’assigner en référé devant le juge judiciaire, une entreprise qu’il contrôle, afin de faire cesser des situations graves :

  • Lorsqu’il constate un risque sérieux d’atteinte à l’intégrité physique d’un travailleur, résultant d’un manquement aux dispositions du code du travail,
  • Lorsqu’il constate l’absence ou l’insuffisance de mesures de coordination en matière de sécurité et protection de la santé sur un chantier du bâtiment ou des travaux publics, constituant un risque sérieux d’atteinte à l’intégrité physique d’un intervenant,
  • Lorsqu’il constate l’emploi de salariés, en l’absence de dérogation légale, un dimanche,
  • lorsqu’il constate qu’une entreprise de travail temporaire manque à certaines obligations et qu’il en résulte un risque sérieux de préjudice pour l’intérimaire,
  • Ou en cas de non-exécution de mesures prescrites par un juge suite à un accident du travail survenu dans une entreprise manquant gravement aux règles de sécurité.
    Cet outil est généralement mis en œuvre après qu’ait été constaté un refus manifeste de l’employeur de remédier à la situation observée.

Trois illustrations

Des salariés d’une entreprise industrielle du Lot-et-Garonne se trouvaient exposés à des poussières de silice cristalline, à des risques électriques et devaient utiliser de nombreux équipements de travail non conformes à la réglementation. Assignée par l’inspecteur du travail devant le juge des référés, l’employeur s’est vu ordonné, aux termes d’une décision en date du 05/03/2020, de prendre un certain nombre de mesures précises propres à remédier à ces situations dans un délai de quatre mois. Le juge a assorti sa décision d’astreintes pécuniaires par jours ou semaines de retard. Malgré de nombreuses interventions de l’inspecteur du travail visant à accompagner les mises en conformité requises, l’entreprise n’a pas satisfait à ses obligations. Assignée une nouvelle fois, devant le juge de l’exécution du tribunal judiciaire d’Agen, elle a été condamnée au paiement d’une somme de 180 000 € en liquidation de l’astreinte.

Une entreprise gestionnaire d’un hypermarché à Angoulême, ayant décidé d’ouvrir son établissement le dimanche après treize heures (il est interdit aux commerces de détail alimentaire d’employer des salariés au-delà de cette limite) a fait appel aux personnels d’une société de gardiennage, surveillance, sécurité, auxquels il était demandé de surveiller, outre la bonne application des procédures de sécurité, le bon déroulement des opérations de paiement automatiques des achats réalisés par le public.
Constatant, au cours d’un contrôle, que les agents de sécurité réalisaient en fait de nombreuses tâches relevant de l’activité même du magasin (assistance à des clients utilisant des caisses automatiques ou rencontrant des difficultés à biper le code barre, enlèvement de produits abandonnés…), quatre inspecteurs du travail ont assigné l’entreprise en référé devant le président du tribunal judiciaire. Par une décision en date du 06/10/2021, le juge a ordonné, la fermeture du magasin le dimanche après-midi, sous astreinte provisoire de 20000 € par ouverture irrégulière constatée. Cette ordonnance a été confirmée en appel, interjeté par l’entreprise, le 16/03/2022.

Ayant constaté que les travailleurs de plusieurs entreprises, employés sur un chantier de construction d’un barrage hydroélectrique, étaient exposés à des risques d’accidents en raison d’une coordination en matière de sécurité et protection de la santé particulièrement défaillante, un inspecteur du travail de Charente a assigné le maître d’ouvrage en référé devant le tribunal judiciaire d’Angoulême. Rendant une ordonnance en date du 21/07/2021, le président du tribunal a décidé que le chantier devra rester fermé jusqu’à la réalisation de mesure qu’il a enjoint au Maître d’ouvrage de mettre en œuvre, sous astreinte provisoire. Le juge a ainsi ordonné de modifier le contrat du coordonnateur de telle sorte que soient mises en commun les infrastructures, moyens logistiques et les protections collectives afin de prévenir les risques, qu’un plan de circulation et un plan de stockage soient établis, que les cheminements piétons balisés soient aménagés, que des mesures visant à prévenir les risques de noyade soient prises, que les installations sanitaires soient raccordées aux réseaux publics, que les installations électriques soient vérifiées par un organisme accrédité. Le chantier ne devant être accessible que pour la seule réalisation de ces mesures.
L’employeur ayant fait fi de cette ordonnance, le juge de l’exécution, saisi par l’inspecteur du travail, l’a condamné, par jugement du 28 février 2022, à payer la somme de 20000 € au Trésor-Public, en liquidation de l’astreinte.